Le Code du Travail et la Convention Collective du Paysage

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Le secteur du paysage est régi par un ensemble de règles issues à la fois du Code du travail, qui s’applique à l’ensemble des salariés en France, et de la Convention Collective Nationale des Entreprises du Paysage, qui adapte ces dispositions aux spécificités de cette profession. Le but de ce cours est de présenter les principales règles encadrant le travail dans ce secteur, afin de permettre une meilleure compréhension des droits et devoirs des employeurs et des salariés.

Ce cours est structuré en deux parties : la première partie expose les grandes lignes du Code du travail, notamment en ce qui concerne les contrats de travail, la durée du travail, le salaire, les conflits du travail, et la représentation des salariés. La deuxième partie est consacrée à la Convention Collective du Paysage, qui définit des dispositions spécifiques pour les salariés de ce secteur, notamment en termes de niveaux de qualification, de droits particuliers, et de conditions de travail.

Cette approche permettra de saisir non seulement les obligations légales qui s’imposent à l’ensemble des acteurs du monde du travail, mais aussi les spécificités propres au secteur du paysage, qui est un domaine exigeant et en constante évolution.

Première Partie : Le Code du Travail et ses Grandes Lignes

  1. Les Contrats de Travail : CDI, CDD, Apprentissage, Intérim
    • Le contrat à durée indéterminée (CDI) est le contrat par défaut dans le droit français, offrant une stabilité d’emploi au salarié sans limitation de durée. Il prévoit des obligations réciproques entre l’employeur et le salarié : le salarié s’engage à effectuer un travail pour l’entreprise, tandis que l’employeur s’engage à le rémunérer et à lui garantir des conditions de travail décentes. Le CDI peut être résilié soit par le salarié (démission), soit par l’employeur (licenciement), avec le respect des procédures prévues par la loi, notamment la nécessité d’un motif réel et sérieux pour le licenciement.
    • Le contrat à durée déterminée (CDD) est utilisé pour répondre à un besoin temporaire, par exemple pour un remplacement, un accroissement temporaire de l’activité ou un emploi saisonnier. Le CDD est encadré de manière stricte par la loi afin d’éviter les abus. Sa durée maximale est en général de 18 mois, mais peut varier selon les motifs, par exemple pour un chantier spécifique ou une commande exceptionnelle. Il doit comporter une date de fin précise ou être lié à la réalisation d’un objet défini (CDD “à terme imprécis”).
      Le CDD peut être renouvelé, mais uniquement dans la limite de la durée totale prévue par la loi, qui est généralement de 18 mois. Toutefois, la durée totale peut varier selon la nature du poste, par exemple en cas de remplacement d’un salarié absent de longue durée, ou pour des projets spécifiques nécessitant une continuité temporaire. Chaque renouvellement doit être justifié et spécifié par un avenant au contrat initial, et un employeur ne peut pas recourir de manière abusive aux renouvellements pour éviter de proposer un CDI.
      Rupture du CDD : La rupture anticipée d’un CDD n’est possible que dans des cas spécifiques prévus par la loi, comme l’accord entre les deux parties, la faute grave de l’une des parties, la force majeure, ou si le salarié justifie d’une embauche en CDI. En dehors de ces cas, la rupture du CDD est encadrée et toute rupture injustifiée peut entraîner des indemnités pour le salarié. À la fin normale du CDD, le salarié a droit à une indemnité de précarité équivalente à 10 % de la rémunération totale brute perçue pendant la durée du contrat, sauf exceptions (embauche en CDI, refus de renouvellement, etc.).
    • Le contrat d’apprentissage est un contrat alternant formation en entreprise et études en centre de formation. Il vise principalement les jeunes de 16 à 29 ans et permet d’acquérir un diplôme professionnel tout en étant rémunéré. Ce contrat est régi par des règles spécifiques qui définissent la durée du travail, la rémunération en fonction de l’âge et de l’année de formation, ainsi que le rôle de l’entreprise formatrice et du centre de formation. L’objectif est de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes, tout en leur permettant d’obtenir une qualification reconnue.
    • Le contrat d’intérim est un contrat temporaire géré par une agence d’intérim. L’employeur fait appel à l’agence pour un besoin ponctuel, et le salarié est alors lié à cette agence et non directement à l’entreprise utilisatrice. Le contrat d’intérim est généralement utilisé pour des remplacements, des surcroîts temporaires d’activité ou des emplois saisonniers. Le salarié intérimaire bénéficie des mêmes droits que les salariés permanents de l’entreprise utilisatrice, notamment en matière de sécurité et de conditions de travail.
  2. La Durée du Travail et les Congés
    • La durée légale du travail est de 35 heures par semaine en France, mais des aménagements sont possibles, comme le recours aux heures supplémentaires, à des contrats à temps partiel ou à des régimes d’annualisation du temps de travail. Les heures supplémentaires, effectuées au-delà des 35 heures, doivent être rémunérées avec une majoration (généralement de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires, puis 50 % au-delà).
    • Les RTT (Réduction du Temps de Travail) : Les RTT sont des journées ou demi-journées de repos accordées aux salariés afin de compenser une durée de travail supérieure à la durée légale de 35 heures. Elles résultent de l’aménagement du temps de travail sur une base annuelle, qui permet de répartir les heures travaillées différemment sur l’année. Par exemple, si un salarié travaille 39 heures par semaine, il peut bénéficier de journées de RTT pour compenser les 4 heures hebdomadaires excédentaires. Les RTT sont souvent utilisées dans les entreprises pour offrir plus de flexibilité tout en respectant la durée légale du travail.
    • Les congés payés correspondent à 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif, soit 5 semaines de congé par an. Des congés supplémentaires peuvent être accordés en fonction de l’âge, de l’ancienneté ou de la situation personnelle du salarié. Les congés payés sont pris en concertation avec l’employeur, et la période principale de prise de congés est souvent fixée entre le 1er mai et le 31 octobre. Des congés pour événements familiaux (mariage, naissance, décès) sont également prévus par le Code du travail.
  3. Le Salaire
    • Le Code du travail impose un salaire minimum légal, appelé Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance (SMIC), revalorisé régulièrement. Le SMIC est révisé chaque année pour garantir le pouvoir d’achat des salariés. Il représente le minimum en dessous duquel aucun salarié ne peut être rémunéré, sauf dérogations spécifiques (comme pour les apprentis ou les jeunes travailleurs).
    • Les salariés ont droit à un salaire proportionnel à la durée et au type de travail effectué, et des éléments supplémentaires (primes, avantages en nature) peuvent y être ajoutés selon l’accord collectif ou le contrat. Les primes peuvent inclure des primes d’ancienneté, de rendement, de panier, ou encore des primes exceptionnelles. Les avantages en nature, tels que la fourniture d’un logement ou d’un véhicule de fonction, sont également soumis à des règles spécifiques de valorisation.
  4. Les Conflits Individuels et les Conflits Collectifs
    • Les conflits individuels du travail concernent un salarié et son employeur sur des questions comme le licenciement, le non-paiement de salaires, ou la contestation d’une sanction disciplinaire. Ces litiges peuvent être portés devant le Conseil de prud’hommes, qui est la juridiction compétente pour les conflits liés au contrat de travail. Le Conseil de prud’hommes a pour mission de concilier les parties et, en cas d’échec, de juger le litige. Les procédures peuvent être longues, mais le salarié a le droit d’être assisté ou représenté par un avocat ou un représentant syndical.
    • Les conflits collectifs concernent un groupe de salariés et peuvent donner lieu à des mouvements de grève. Les grèves doivent être précédées d’un préavis déposé par les organisations syndicales, sauf en cas de grève spontanée. Les négociations collectives et la médiation sont des outils utilisés pour tenter de résoudre ces conflits. En cas de blocage, l’inspection du travail ou un médiateur peut intervenir pour faciliter le dialogue entre les parties.
  5. Les Représentants du Personnel
    • Dans les entreprises de plus de 11 salariés, les élus du Comité Social et Économique (CSE) représentent les intérêts des salariés. Ils ont un rôle consultatif sur les décisions de l’employeur et veillent au respect des droits des salariés. Le CSE dispose de prérogatives en matière de santé, sécurité et conditions de travail (SSCT) et doit être consulté sur les grands projets de l’entreprise (restructurations, licenciements économiques, etc.).
    • Le CSE traite des questions économiques, sociales et de santé au travail. Il est le médiateur entre les salariés et l’employeur sur des sujets liés aux conditions de travail. Les membres du CSE bénéficient d’heures de délégation pour exercer leurs fonctions et ont droit à une protection contre le licenciement abusif.

Deuxième Partie : La Convention Collective du Paysage

  1. Les Niveaux de Qualification dans la Convention Collective du Paysage
    • La Convention Collective Nationale des Entreprises du Paysage prévoit une classification des emplois en fonction des compétences, de l’expérience et des responsabilités. Elle définit des niveaux de qualification qui vont des ouvriers non qualifiés aux cadres dirigeants. Cette classification permet de garantir une rémunération équitable en fonction des compétences de chaque salarié.
    • Les ouvriers sont classés en six niveaux (O1 à O6), allant de l’ouvrier débutant à l’ouvrier hautement qualifié, avec des échelons qui reconnaissent des compétences spécifiques, comme l’autonomie sur un chantier ou la capacité à encadrer une équipe. Voici une description des différents niveaux :
    • Niveau O1 : Ouvrier débutant – Ce niveau correspond aux ouvriers sans expérience préalable dans le secteur du paysage. Ils travaillent sous la supervision directe de leurs supérieurs et effectuent des tâches simples d’exécution, telles que le désherbage, la plantation ou le nettoyage de chantier.
    • Niveau O2 : Ouvrier qualifié – Les ouvriers de ce niveau possèdent une première expérience ou une formation (CAP) dans le secteur. Ils peuvent exécuter des travaux standards de manière autonome, mais nécessitent encore un encadrement régulier. Ils commencent à maîtriser l’utilisation d’outils spécifiques, tels que les taille-haies ou les tondeuses.
    • Niveau O3 : Ouvrier professionnel – Ce niveau implique une autonomie plus importante. L’ouvrier professionnel est capable de réaliser des tâches complexes, telles que la pose de dallage ou l’installation de systèmes d’irrigation. Il est également en mesure d’identifier des problèmes courants et de proposer des solutions adaptées.
    • Niveau O4 : Ouvrier hautement qualifié – L’ouvrier de niveau O4 est compétent pour réaliser des travaux exigeant une haute technicité. Il peut superviser des petits chantiers et encadrer un ou deux collègues moins expérimentés. Il a une bonne connaissance des végétaux et des techniques d’aménagement paysager.
    • Niveau O5 : Maître ouvrier – À ce niveau, l’ouvrier est responsable de la coordination de plusieurs équipes sur un chantier. Il a une solide maîtrise technique et est capable de gérer des projets dans leur ensemble, y compris la relation avec le client. Il possède également des compétences en gestion des ressources humaines sur le chantier et peut seconder le chef d’équipe.
    • Niveau O6 : Chef d’équipe ou chef de chantier – L’ouvrier de niveau O6 est un expert dans son domaine et possède une grande expérience. Il est responsable de la supervision complète du chantier, de l’organisation des tâches à la gestion des ressources et à la sécurité des travailleurs. Ce niveau exige des compétences managériales importantes, en plus de l’expertise technique.
      Chaque niveau est associé à une grille de salaire minimale, mise à jour régulièrement pour tenir compte de l’inflation et des évolutions des conditions de travail.
    • Les techniciens et agents de maîtrise (TAM) disposent de leur propre grille, avec une reconnaissance des compétences techniques avancées et de la capacité à superviser des projets complexes. Voici les principales caractéristiques de ces niveaux :
    • Technicien Niveau TAM1 : Technicien débutant – Ce niveau correspond aux techniciens qui possèdent des compétences techniques de base et qui travaillent sous la supervision de techniciens plus expérimentés. Ils sont capables de mettre en œuvre des projets simples et d’assurer des tâches opérationnelles spécifiques.
    • Technicien Niveau TAM2 : Technicien confirmé – À ce niveau, les techniciens possèdent une solide expérience dans le secteur et peuvent gérer des aspects techniques complexes. Ils interviennent sur des installations nécessitant une connaissance approfondie des outils et des méthodes spécifiques, et sont souvent responsables de l’assistance technique auprès des équipes sur le terrain.
    • Agent de Maîtrise TAM3 : Responsable de chantier – Les agents de maîtrise de niveau M2 ont une responsabilité élargie, incluant la coordination de plusieurs équipes sur différents chantiers. Ils doivent gérer les ressources humaines et matérielles, assurer la liaison avec les clients, et veiller au bon déroulement des opérations, tout en garantissant le respect des normes de sécurité et des réglementations en vigueur.
    • Agent de Maîtrise TAM4 : Coordinateur de projet – Ce niveau correspond à des agents de maîtrise expérimentés qui ont la capacité de gérer plusieurs projets simultanément. Ils travaillent de manière autonome et peuvent être responsables de la planification stratégique des chantiers, de la gestion des budgets, et de la coordination entre les différents acteurs du projet (clients, fournisseurs, équipes).

Les techniciens sont souvent responsables de la mise en œuvre de projets spécifiques, tandis que les agents de maîtrise assurent la coordination des équipes sur le terrain et la gestion des ressources nécessaires. Les cadres, quant à eux, se situent au sommet de cette hiérarchie technique et managériale. Voici les principales caractéristiques des niveaux de cadre :

  • Cadre Niveau C1 : Cadre technique – Ce niveau correspond aux cadres ayant une expertise technique avancée et une responsabilité partielle sur un chantier ou un projet spécifique. Ils jouent un rôle de soutien aux agents de maîtrise et veillent au bon déroulement des tâches techniques, tout en apportant des solutions aux problèmes complexes rencontrés.
  • Cadre Niveau C2 : Cadre de projet – Les cadres de ce niveau sont responsables de l’ensemble d’un projet ou d’un chantier. Ils planifient, organisent et coordonnent les activités, gèrent les équipes et veillent au respect des délais et du budget. Ils sont également les principaux interlocuteurs des clients et des autres parties prenantes du projet.
  • Cadre Niveau C3 : Cadre dirigeant – Les cadres dirigeants ont des responsabilités stratégiques au sein de l’entreprise. Ils sont responsables de plusieurs projets ou chantiers simultanément et participent aux décisions importantes en matière de développement, de politique d’entreprise, et de gestion des ressources. Ils supervisent les cadres de projet et ont pour mission de garantir la rentabilité et la pérennité des activités de l’entreprise. Cette classification permet de valoriser les compétences techniques, managériales et stratégiques acquises avec l’expérience, et de définir des responsabilités adaptées à chaque niveau.
  1. Les Droits Particuliers des Salariés dans la Convention Collective du Paysage
    • Santé et Sécurité : Les employeurs doivent garantir la santé et la sécurité des salariés. Des équipements de protection individuelle (EPI) sont obligatoires, et une formation spécifique est prévue pour les travaux à risque. Les employeurs doivent également organiser des visites médicales régulières pour s’assurer que les salariés sont aptes à exercer leurs missions, notamment lorsqu’ils sont exposés à des risques particuliers (produits phytosanitaires, travail en hauteur, etc.).
    • Indemnité de Transport : Pour compenser les frais de transport liés aux interventions sur différents sites, les salariés du secteur ont droit à une indemnité de transport ou au remboursement partiel des frais engagés en fonction de la distance du chantier par rapport au dépôt. Cette prime vise à couvrir les frais de déplacement entre le domicile et les différents chantiers, qui peuvent être éloignés les uns des autres, et à reconnaître l’impact des déplacements sur les conditions de travail.
    • Formation Professionnelle : La convention prévoit des actions de formation pour le développement des compétences des salariés. Ces formations peuvent être obligatoires, notamment pour la manipulation de certains outils ou substances dangereuses. La formation continue est encouragée pour permettre aux salariés de suivre les évolutions technologiques et réglementaires du secteur du paysage, garantissant ainsi la qualité des prestations et la sécurité sur les chantiers.
    • Congés Supplémentaires : En fonction de l’ancienneté et des conditions de travail, des jours de congés supplémentaires peuvent être accordés, en particulier pour les ouvriers travaillant dans des conditions difficiles (exposition aux intempéries, risques chimiques, etc.). Ces congés supplémentaires sont une reconnaissance de la pénibilité de certains travaux et visent à compenser l’usure physique et mentale que ces conditions peuvent entraîner.
    • Régime de Prévoyance : Un régime de prévoyance est mis en place, couvrant notamment l’invalidité et le décès. Il vise à protéger les salariés et leurs familles en cas d’accident grave ou de maladie. Ce régime inclut des prestations complémentaires, telles que des indemnités journalières en cas d’arrêt de travail prolongé, des rentes d’invalidité, et un capital versé aux ayants droit en cas de décès du salarié.